Bourses africaines : où investir avant l’hiver

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Investir à Casablanca, Tunis, Abidjan ou au Caire ? François Conradie, trader, qui est intervenu dans plusieurs places financières africaines, en y accompagnant notamment les fonds de pensions américains, fait le point.

Egypte : la plus grande et la plus ancienne

L’Egyptian Exchange (appelée jusqu’en 2008 le Cairo and Alexandria Stock Exchange) a été créée en 1883, ce qui en fait la plus vieille institution boursière en Afrique, juste devant Johannesburg, de quatre ans moins âgée, mais de loin la plus importante en termes de capitalisation et de volume de transactions. La place égyptienne compte aujourd’hui 80 milliards de dollars de capitalisation et plus de 300 entreprises cotées. Deux des trois premières capitalisations boursières sont des sociétés des légendaires frères Sawiris. Il s’agit d’Orascom Construction, qui pèse 9,4 milliards de dollars, soit le cinquième du marché, et d’Orascom Télécom, qui flirte avec les 5 milliards de dollars. Pour les investisseurs, l’investissement dans la cote égyptienne comporte une exposition économique pas totalement africaine. Par exemple, 80% du chiffre d’affaires d’Orascom Constructions est généré en dehors d’Egypte. De même, Orascom Telecom est active en Italie, en Corée du Nord et au Bangladesh. Ces considérations, jointes au poids de l’économie égyptienne et à sa population, font de la Bourse du Caire un passage obligé pour tous les investisseurs spécialistes de la région MENA. En raison peut-être de sa connexion à la finance mondiale, Le Caire a accusé le coup en 2008, avant de rebondir en 2009. En 2010, le marché est globalement haussier, hormis les pauses de mai et de juin. Les cours sont tous légèrement en hausse pour les bigs caps, à l’exception notable de la CIB, la plus grande banque en termes de capitalisation boursière, qui accuse un recul notable de 63% depuis le début de l’année et de Mobinil, en décote de 25% sur l’année en cours. A contrario, Ghabbour Auto a vu sa capitalisation boursière passer du simple au double, tutoyant le milliard de dollars. Quelques risques à signaler toutefois sur cette place : contrairement à Casablanca et à Tunis, il n’y a pas de limite dans les variations journalières au Caire. Des gains immenses peuvent s’amonceler ou se dissiper en une journée. Côté imposition, Le Caire applique une taxe de 20% sur les dividendes. Les plus-values ne sont pas imposées.

Casablanca a besoin d’air frais

Depuis la fin de la période euphorique 2005-2008, Casablanca marque le pas. Les volumes sont en retrait. La performance des indices est très moyenne. On est loin du niveau de la mi-mars 2008, quand le MASI (indice all-share) touchait presque les 15 000 points. Aujourd’hui, l’indice général tourne autour de la barre des 12 000 points. Du coup, les candidatures à l’introduction se font rares. Les investisseurs qui avaient souscrit à Label Vie, introduit en 2008 avec un PER avoisinant 60, ne sont plus casse-cou. Aussi, à la suite du promoteur immobilier Alliances, introduit en juin 2008, seule une IPO a été réalisée depuis. Il s’agit de la Tunisienne Ennakl, qui a créé un précédent en se faisant coter en simultané à Casablanca et à Tunis. C’était en juillet 2010. Depuis, la valeur est en chute libre dans un marché encore nostalgique de l’introduction de Maroc Télécom, en décembre 2004.

Solidement cramponné à son statut de première capitalisation boursière du royaume (15 milliards de dollars), Maroc Télécom, cotée aussi à Paris, constitue l’une des valeurs préférées par les investisseurs étrangers au Maroc. Malgré le ralentissement des indices, les dividendes payés par la Bourse de Casablanca sont relativement attrayants. En 2008, on a noté toutefois un mouvement de retrait de certains investisseurs étrangers, ce qui a aggravé la tendance baissière. Aujourd’hui encore, on ne distingue pas une tendance bien claire de la place marocaine. Des analystes considèrent qu’une correction supplémentaire rendrait la bourse plus attractive. Le retrait, cette année, des valeurs ONA et SN, deux valeurs phares du marché, a réduit la capitalisation de la place de 5,5 milliards de dollars (1/10e du total). Les traders sur le court terme, qui appréciaient particulièrement le papier ONA (liquide), devront reporter leur dévolu sur d’autres valeurs. Ce retrait des deux valeurs ONA et SNI devrait en fait booster le marché, puisqu’il est prévu que les deux groupes cèdent au marché le contrôle de certaines de leurs filiales. Pour l’heure, aucune date n’est fixée. Du papier frais redonnerait du tonus à la place.

Côté investissement, Casablanca ne pose pas de problèmes. La compensation se fait à T +3 et des garde-fous existent pour protéger les investisseurs, qui peuvent compter sur un gendarme du marché vigilant et un fonds destiné à réduire le risque de contrepartie. Une taxe de 15% est appliquée sur les dividendes. Les plus-values sont imposées à 10%.

Tunis : séance de rattrapage

Considérée pendant longtemps comme une petite place inintéressante, la Bourse de Tunis s’impose aujourd’hui comme une place de prédilection pour les institutionnels et les fonds d’investissements. C’est l’une des deux Bourses africaines à finir l’année 2008 sur une note positive, grâce à une croissance économique soutenue et à une situation de liquidité intéressante. En moyenne, sur les six derniers mois, les volumes moyens de transactions journalières à Tunis dépassent 5 millions de dollars. Durant l’été dernier, Tunis a, sur plusieurs séances, traité plus de volumes que Casablanca. De nouvelles introductions devraient consolider les acquis. L’arrivée de Tunisie Telecom, second opérateur du pays, très attendu à la cote par les investisseurs, devrait bousculer la hiérarchie. Le gouvernement a pris une série de mesures pour introduire le maximum d’entreprises possibles. L’objectif de 100 sociétés cotées, d’ici 2015 (contre 51 aujourd’hui), est-il à la portée ?

 


En moyenne, sur les six derniers mois, les volumes moyens de transactions journalières à Tunis dépassent 5 millions de dollars. Durant l’été dernier, Tunis a, sur plusieurs séances, traité plus de volumes que Casablanca.


La question ne se pose pas à Tunis, où l’indice composite affiche une hausse de 30% depuis octobre 2009. Sur le long terme, la stratégie est payante pour ce pays sans richesses minières, situé entre l’Algérie et la Libye, et qui entend mettre sa position stratégique à profit pour fournir de l’expertise et des services à haute valeur ajoutée à ses deux voisins, riches en gaz et pétrole. Cette image est renforcée par une attractivité fiscale de la place de Tunis. Aucune taxe sur les dividendes, les plus values et les fonds investis. (Une donne remise en question par l’actuel ministre des Finances, qui compte imposer les plus-values). Comme à Casablanca, la compensation se fait à T +3. A comparer ces conditions avec l’opacité qui caractérise certains marchés du Sud, il est clair que la tendance positive tunisienne a encore de beaux jours devant elle.

BRVB : « le marché de la Sonatel »

La Bourse régionale des valeurs mobilières d’Abidjan (BRVM, commune aux huit pays de l’UEMOA), est la plus récente des quatre bourses traitées dans ce dossier. Son premier son de cloche date de 1998. Malgré son caractère régional, la BRVM est dominée par des valeurs ivoiriennes, qui comptent 33 des 38 sociétés cotées. Le Bénin, le Burkina Faso, le Niger, le Sénégal et le Togo comptent chacun une entreprise cotée. La Guinée Bissau et le Mali n’en comptent pour le moment aucune. L’opérateur sénégalais Sonatel est toutefois, avec 2,9 milliards de dollars, la plus grosse capitalisation de la place. La filiale de France Télécom pèse pour 43% de la capitalisation totale du marché et, durant les six derniers mois, pour plus de la moitié des volumes traités. Le groupe Ecobank (Togo) et Onatel (Burkina Faso) suivent loin derrière, avec respectivement 940 millions de dollars et 320 millions de dollars. Les trois sociétés représentent 62% de la capitalisation du marché et 61% des transactions. Depuis le début de l’année, l’indice général de la place s’est apprécié de 13%, tiré par les performances de 15% de la Sonatel et d’Ecobank et un impressionnant 150% de hausse de la SAPH, le groupe ivoirien spécialiste du caoutchouc (290 millions de capitalisation). A l’inverse, Onatel, qui accuse 7% de baisse depuis le début de l’année, a plombé l’indice général.

Du point de vue technique, la BRVM a besoin de faire évoluer ses infrastructures pour jouer dans la même cour que Lagos ou Casablanca. Pour l’heure, Abidjan traite pour seulement 500 000 dollars de transactions par jour, ce qui réduit le plafond des investissements en infrastructures. La cotation se fait au fixing, deux fois sur chacune des cinq séances de la semaine. L’objectif est d’aller vers le marché en continu. Les dénouements se font à T +3, en ligne avec les standards internationaux. Des consultations sont en cours pour rendre cohérent le système de taxation. Il y a actuellement une taxe sur les plus-values qui varie de 10 à 12%.

 

 

Source: www.lesafriques.com

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